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 DEDICACE A MES OREILLES : Chronique

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    LOU REED - ROCK AND ROLL HEART  : 1976  (Original US)

               Le Grand Album Oublié

Lou REED revient sur le devant de la scène grâce à un très grand album CONEY ISLAND BABY.

Dans la foulée de cette verve retrouvée, il enregistre la même année un excellent et trop méconnu nouvel album, ROCK AND ROLL HEART.

 

Le nom prévu était NOMAD, ce qui aurait été un excellent titre, mais au dernier moment Lou REED décide que ce sera ROCK AND ROLL HEART.

 

Le contexte de cet album est assez complexe et la vie de Lou REED à cette époque est des plus hasardeuse. Sur le plan personnel, il vient de se séparer de sa compagne, un transsexuel nommé RACHEL. Sur le plan de ses affaires, il vient de terminer une série de procès avec Denis KATZ son ex avocat et manager, qui l’a contraint à quitter RCA et signer avec le label de Clive DAVIS, ARISTA. Sa santé enfin, n’est pas au mieux sans doute à cause de sa consommation exagérée de drogues et speed en tous genres, auxquels il faut ajouter sa récente attirance pour l’alcool.

Ses fréquentations d’alors sont très controversées et contribuent un peu plus à le faire plonger dans cette vie de paumé New-yorkais, qu’il dépeint si brillamment dans ses chansons.

 

Pourtant le récent succès de CONEY ISLAND BABY lui a redonné l’envie de composer sur des thèmes un peu plus optimistes.

Il est vrai que les sorties de SALLY CAN’T DANCE et surtout celle de METAL MACHINE MUSIC se sont avérées catastrophiques pour son image et la presse ne s’était pas gardée de crier haut et fort que le personnage de Lou REED n’était plus qu’une caricature de lui-même, et ses déclarations superflues, voire imbéciles.

 

ROCK AND ROLL HEART est à nouveau une belle réussite personnelle pour Lou REED. Il signe tous les titres, joue toutes les guitares, mixe et produit l’album. Ni plus, ni moins.

Le son du vinyle US est carrément fantastique. Il y a une puissance et une présence des instruments et la voix de REED vient se poser admirablement.

 

Comme toujours, pour qu’un album soit réussi, il faut les 2 ou 3 chansons qui servent de locomotives. Ici, ce sont LADIES PAY, YOU WEAR IT SO WELL et VICIOUS CIRCLE.

 

C’est à du très grand Lou REED qu’on a affaire ici.

LADIES PAY est sans doute une de ses plus belles chansons, mais que la plupart des gens ignorent. La partie de piano fait penser à BECAUSE THE NIGHT, pas encore écrit en 76, et le solo de guitare de Lou REED nous prouve qu’avec les 3 accords qu’il connaît (c’est lui qui le dit), il est capable de faire sonner une guitare comme personne et nous faire vibrer intérieurement. Quant à sa voix, avec son style « chanté, parlé », elle est carrément superbe.

Pour une fois, il prend le parti des femmes, celles qui sont abandonnées par les hommes et dont le sort est ingrat.

 

Patti SMITH lui disait d’ailleurs, à cette époque, alors qu’elle l’entendait enregistrer en studio : « Comment se fait-il qu’un salaud fini comme toi puisse faire une musique aussi belle ? »

 

VICIOUS CIRCLE est une ballade magnifique et là encore sa voix, chaude et fragile, quasi parlée, reste inimitable. C’est comme ça qu’on l’aime et qu’on voudrait qu’il chante toujours.

 

Enfin YOU WEAR IT SO WELL, sur lequel Lou s’adresse à quelqu’un qui cache bien ses secrets, accompagné des chœurs de son vieux complice d’université, Garland JEFFREYS, est également un des grands moments de l’album.

 

Le reste est très varié. BANGING ON MY DRUM est un rock dans le genre de WAITING FOR MY MAN. A SHELTERED LIFE, un jazz datant encore de l’époque du VELVET joue sur le même tempo que BEGINNING Of A GREAT ADVENTURE sur l’album NEW YORK. Et toujours ce son d’un réalisme étonnant.

I BELIEVE IN LOVE et ROCK AND ROLL HEART font hérisser les poils de ses vieux fans qui veulent qu’il devienne un des représentants de la PUNK ATTITUDE, alors que Lou a toujours nié son attirance pour ce mouvement encore en gestation à cette époque.

SENSELESSLY CRUEL révèle une fois encore sa crainte et sa maladresse avec la gente féminine.

L’album se termine sur un morceau autobiographique, TEMPORAY THINGS, sur un tempo lent et au climat lourd sur lequel les femmes sont à nouveau traitées de BITCH, et à qui on demande de dégager vite fait, et qu’elles ne sont pas là pour durer. Toujours dans la délicatesse Lou REED !

 

Les chansons de cet album sont souvent courtes et ne dépassent pas les 3 minutes, à part LADIES PAY et TEMPORARY THINGS. L’album, à sa sortie, déroute quelque peu le public, mais dans l’ensemble reçoit un bon accueil..

 

La pochette nous laisse apparaître un Lou REED redevenu homme, sans ses éternelles lunettes noires, sans ses cheveux courts blonds peroxydés. Son vernis à ongle noir a également disparu. C’est un nouveau Lou REED qui repart en tournée mondiale et qui joue dans des petites salles. Malgré son accueil favorable, ROCK AND ROLL HEART se vend mal et Lou REED n’inclura qu’un seul titre dans son répertoire.

 

Il est temps de redorer le blason et de découvrir cet album essentiel du grand Lou REED.

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